En Une
Comment créer un vrai contact visuel sur Zoom
- Pourquoi les interactions ne sont-elles pas naturelles en vidéoconférence ?
- Que font les présentateurs pour surmonter ce manque de naturel ?
Pourquoi les vidéoconférences créent-elles cette sensation bizarre de ne jamais pouvoir établir un contact fluide et naturel avec nos interlocuteurs ? Il y a toujours quelque chose de décalé, un faux rythme, une interaction qui semble perpétuellement taper à côté… L’information finit bien entendu par passer, mais en termes de rapports humains, l’expérience reste médiocre.
Et pourtant quand on pense aux présentateurs/trices TV, alors même qu’il n’y a pas d’interaction, la qualité de cette expérience est bien meilleure : on a quasiment la sensation d’être connecté ! Ne cherchez plus : tout vient du regard. Et plus précisément de la façon qu’ont ces journalistes d’établir un contact visuel… avec le vide !
Un professionnel du petit écran regarde la caméra lorsqu’il parle. De fait, en regardant notre télé, les yeux de celui-ci semblent nous fixer. De son côté, pour donner plus de chaleur et d’authenticité à son expression, il s’efforce de visualiser son ou ses interlocuteur(s). Une famille. Un être cher. Ce qui lui convient le mieux en fait.
Parce que c’est ainsi depuis des millions d’années, le regard est le précurseur de tout échange. Il dit à l’autre : « Je suis là. Je te vois. Échangeons ». Désormais, pour instaurer plus d’authenticité dans vos échanges online, ne regardez que la caméra lorsque vous parlez. Ne vous adressez plus à « l’image » de votre interlocuteur. Et suggérez qu’il fasse de même.
Quoi d’autre ?
Pourquoi, lorsqu’on nous parle, les mots pèsent-ils moins que tout le reste ?
- Quand quelqu’un parle, les mots ne sont pas les premières choses que l’on écoute
- Cela nous vient de notre époque d’hommes et de femmes « des cavernes »
Si l’envie nous prenait de regarder un film et d’en couper le son, on ne manquerait pas nécessairement l’essentiel. Il nous serait toujours loisible de déchiffrer, de comprendre ou d’être surpris par l’aventure humaine qui se déroule sous nos yeux. À l’inverse, quand on lit un scénario qui n’a pas encore été tourné, il est extrêmement difficile de se laisser emporter ou de saisir les nuances et la puissance de l’histoire.
Ceci est dû à la place que tiennent les mots dans l’ensemble des informations qui nous parviennent quand on écoute quelqu’un. Pendant des millions d’années nous nous sommes passés de langage construit et notre seule préoccupation était de parvenir à « lire » les intentions de celui – animal ou humain – qui se présentait devant nous : « bienveillant ou malveillant ? »
Aujourd’hui encore, notre ADN porte la marque de ce mécanisme de survie. Ainsi, lorsque nous percevons une dissonance entre les mots et le comportement, notre attention se tourne immédiatement vers les signaux qui nous permettraient de décrypter les motivations réelles de l’individu. En quelque sorte, celui qui parle est condamné à croire en ce qu’il dit, faute de quoi les experts que nous sommes détecteront vite son manque de sincérité.
Si vos gestes, votre énergie, votre langage corporel et votre ton sont en ligne avec ce que vous dites alors, et seulement alors, les gens écouteront vraiment vos mots.
What’s in it for you?
Même au bureau, notre langage nous trahit
- L’Analyse transactionnelle décrit nos “petits jeux” quand nous parlons
- Le type de mots utilisé nous dit de quel jeu il s’agit
Dans son modèle des interactions entre individus, l’analyse transactionnelle, Eric Berne1 a observé que nous prenions essentiellement trois postures dans nos échanges avec autrui, qui varient selon le contexte, la conversation et l’interlocuteur. De manière très synthétique, soit nous jouons le « Parent » (Critique ou Protecteur), soit nous nous posons en « Enfant » (Soumis, Libre ou Rebelle), ou bien nous prenons une attitude « Adulte ». Le nom de chacun de ces « États » parle de lui-même.
Les deux premières postures – généralement inconscientes – nous piègent souvent dans une communication de travail infructueuse et stressante. Et il est préconisé, lorsqu’on s’en aperçoit, de revenir dans l’état Adulte, un état où l’on se contente d’annoncer les faits, sans jugement. Mais les mots que l’on emploie sont souvent un indicateur de l’État qui est le nôtre. Par exemple, le Parent Critique : « Tu, ta faute, ta responsabilité, bien, pas bien, tu devrais, tu n’es pas capable, écoutes-moi… » Ou le Parent protecteur : « Ne t’inquiètes pas, pas de problème, c’est trop pour toi, je vais le faire… »
Chez l’Enfant (et ses trois variantes confondues) : « Moi, je veux, maintenant, c’est génial, c’est pas juste, jamais, oui mais, je ne peux pas, je ne le ferai pas, bon très bien, ça ne me concerne pas, et alors ?, j’en n’ai rien à faire… » Et l’Adulte : « Voici, pourquoi ?, besoin, où ?, quoi ?, peut-on ?, parce que, ainsi, de sorte que, étant donné, non désolé, vous pouvez, permettez-nous de… »
Ce qui compte, bien évidemment, n’est pas de se surveiller en permanence ou d’éviter toute une liste de son vocabulaire mais bel et bien de prendre davantage conscience de la nature de ses rapports à autrui au moment même où l’interaction a lieu (et pas seulement lorsque l’engueulade est terminée). Quand on comprend ce qui se passe, on peut au moins choisir d’y faire quelque chose… ou pas.
(1) Berne, E. (1971) Analyse transactionnelle et psychothérapie. Payot, Paris.