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Parlez « parlé », quand vous parlez !
- La majorité des présentations ressemblent à des rapports lus devant un auditoire.
- Le langage parlé est bien plus adapté.
« Il est à noter que les profits dégagés sur le T1 2022 ne se sont pas montrés à la hauteur des projections du Codir, et dans cette perspective nous avons préféré un jeu d’écriture préservant le trend actuel… » Cette phrase a été entendue en comité de direction. On se demande pourquoi la plupart des présentations professionnelles sont d’un mortel ennui. Voilà l’une des raisons : parce que les gens parlent comme ils écrivent un rapport. Alors qu’il faudrait faire le contraire : utiliser un langage parlé.
Parce que lorsqu’on écoute quelque chose d’écrit (ou du jargon d’entreprise), le cerveau ‘micro-disjoncte’ : il traduit dans une langue qui lui est naturelle des expressions ou des tournures qui le sont moins. Mais le débit de l’orateur.trice, lui, ne tient pas compte de ces micro-coupures et avance comme un cheval au galop. L’auditeur accumule donc régulièrement du retard et doit tout aussi régulièrement faire des coupes franches au niveau de sa compréhension, pour rester au même rythme que celui ou celle qui parle…
L’orateur.trice devrait utiliser des mots simples, des mots de tous les jours : ceux qui s’assimilent aussi vite qu’ils s’entendent. Il devrait répéter ses idées, aussi : parce que le cerveau oublie quand il y a trop d’informations. On doit donc insister sur ce qu’il doit retenir. La répétition structure le discours : « Je vais vous expliquer ceci. » Et on explique. « Je vous ai parlé de ceci et maintenant je vais vous parler de cela… » Ainsi on suit le défilement de la pensée. « Ayant parlé de ceci et de cela, tout ce que je viens de dire contribue à ma démonstration… » Et on se dit aussitôt : il.elle a parlé de A, puis de B. Et A + B = C. C’est clair.
Simplicité. Répétition.
Quoi d’autre ?
Plus on doute, plus c’est important
- Le doute est proportionnel à l’enjeu.
- La force du doute est donc un indice de la valeur de l’enjeu.
Voici quelque chose à savoir : plus un projet nous tient à cœur et plus nous sommes confrontés à nous-mêmes lors de son exécution. Comme si nous avions un double dont le seul but était de nous saboter. Et plus le projet est important pour nous, et plus ce double est fort !
Donc, si vous vous prenez à procrastiner, à vous saborder, à douter de vous-même et de vos capacités, à vous laisser distraire par tout et n’importe quoi ou à refuser de vous mettre au travail et vous auto-critiquer plus que de raison… et bien sachez qu’il y a de l’or au bout de la ligne ! Ces réactions de défense et de peur de l’échec indiquent indubitablement l’importance, pour vous, de ce que vous entreprenez.
Attention, cela pourrait tout aussi être son contraire ! Mais une fois reconnu que le signe est bon, il ne vous reste plus qu’à vous assoir et à vous mettre au travail, sans trop penser au reste.
Dès maintenant !
What’s in it for you?
Boostez vos effets !
- L’Art du discours est multimillénaire.
- Voici cinq effets employés par les maîtres.
La présentation, on s’en doute, n’est pas née avec l’entreprise. Très tôt dans l’histoire humaine, des intellectuels, dont le plus connu d’entre eux est Cicéron, ont codifié ce que l’on appelle des « figures de rhétorique », c’est-à-dire des techniques pour dynamiser et rendre attractif notre prise de parole. En voici quelques-unes.
La litote, qui tend à en dire moins pour faire entendre beaucoup plus. Par exemple : « Il est vrai, que parfois, les militaires s’exagérant l’impuissance relative de l’intelligence, négligent de s’en servir. » (De Gaulle, dans Le Fil de l’Épée)
L’antithèse, où l’on accole des choses contraires dans l’idée de choquer. Comme ici : « Je n’ai jamais vu un enfant sans penser qu’il deviendrait vieillard, ni un berceau sans songer à une tombe. » (Gustave Flaubert, in Pensées.)
L’oxymore, qui est une alliance de mots étonnants, voire contraires, pour renforcer une idée. Ainsi : « Le superflu, chose très nécessaire. » (Voltaire, dans Le Mondain)
La prosopopée, dans laquelle on fait parler ou agir une personne morte, absente ou feinte, ou une chose inanimée. Comme : « – Je suis un renard, dit le renard.
– Viens jouer avec moi, lui proposa le petit prince. Je suis tellement triste…
– Je ne puis pas jouer avec toi, dit le renard. Je ne suis pas apprivoisé. »
(Antoine de Saint-Exupéry, dans Le Petit prince)
L’hypotypose, qui consiste à décrire de manière précise un objet ou une scène, de façon imagée, pour le rendre vivant. Exemple : « Les entrailles me brûlent. La violence du venin tord mes membres, me rend difforme, me terrasse. Je meurs de soif, j’étouffe, je ne puis crier. C’est l’enfer, l’éternelle peine ! Voyez comme le feu se relève ! Je brûle comme il faut. Va, démon ! (Arthur Rimbaud, extrait de Nuit de l’enfer)
Il nous arrive fréquemment de faire spontanément appel à ces figures. Mais il va de soi que « l’Art » commence par la conscience, puis la maîtrise de toutes ces techniques.
Pour aller plus loin :
- Les Figures du discours, de Pierre Fontanier. Champs Classiques chez Flammarion.
- Les figure de style et de rhétorique, de Jean-Jacques Robrieux. Les Topos chez Dunod.